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Analyse de l'Histoire de la ville de Montdidier (Victor de Beauvillé)
par la Société de l'École des chartes

Victor de Beauvillé est l'auteur de l'imposante Histoire de Montdidier en 3 volumes in-4°. La Société de l'École des chartes en a rédigé une longue analyse critique qui a été publiée en 1859 dans sa revue de la vingtième année, tome cinquième, quatrième série. Cet ouvrage de la Société de l'École des chartes est intégralement disponible en ligne sur Google Books (document PDF pages 201 à 213 équivalent aux pages 182 à 194 de l'ouvrage). Voici la transcription du texte qui nous intéresse :

Histoire de la ville de Montdidier, par Victor de Beauvillé, membre de la Société des antiquaires de Picardie. — Paris, Didot, 1857, 3 vol. in-40, pl.

L'étude de l'histoire locale, qui avait pris sur la fin du siècle dernier un si grand développement, nous a donné un nombre considérable d'histoires de villes. De nos jours, loin de s'arrêter, le mouvement communiqué semble atteindre des proportions telles, qu’on pourrait, jusqu'à un certain point, fixer le moment où toute localité un peu importante de notre pays aura ses annales et son histoire propre. A cela rien de bien surprenant. Quoi de plus naturel en effet, et en même temps quoi de plus doux que de se préoccuper des lieux qui nous ont vus naître, qui ont été notre berceau, notre entrée dans la vie, et qui peuvent nous promettre le port ? Ajoutez qu'une telle étude, attrayante par elle-même, a toujours un but élevé, celui d'être utile à nos compatriotes. Mais, si la tâche est belle, et par conséquent capable de tenter, il faut bien reconnaître qu'elle offre des difficultés de plus d'un genre; car il faut pour l'accomplir an concours de circonstances dont la réunion n'est pas toujours possible. D'abord, de grands loisirs, ensuite des moyens d'étude et d'investigations multipliés ; puis encore une connaissance approfondie du pays, une patience à toute épreuve dans des recherches inépuisables ; enfin un jugement sûr dans l'emploi et la disposition de tant de matériaux acquis. Aussi les bonnes histoires des villes se comptent-elles. Et par histoire de ville, nous entendons ici une histoire complète, s'étendant depuis les origines de la ville jusqu'à son état actuel, et embrassant dans ce laps de temps tout ce qui constitue sa vie, sans exception et sans lacunes. Nous avons beaucoup de livres qui traitent de l'histoire de nos villes, et qui contiennent, les uns plus, les autres moins que cela ; les premiers ne s'attachant qu'a certaines parties, par exemple les antiquités ou les mouvements religieux ; les autres, donnant avec l'histoire d'une ville, celle du pays dont elle est le centre. Tel n'est pas le livre dont nous allons parler. C'est bien une histoire de ville proprement dite, histoire complète, mais spéciale, donnant tout ce qui, de près ou de loin, se rattache à la ville, mais rien au delà.

L'Histoire de la vide de Montdidier est divisée en quatre livres qui forment trois beaux volumes in-4°. Le premier livre contient le récit de tout ce qui s'est passé à Montdidier depuis son origine jusqu'à nos jours. C'est la matière du premier volume. Le deuxième livre, qui forme le second volume, est consacré à l'histoire et à la description de tous les monuments de la ville encore subsistants. Le troisième livre s'occupe du même objet, pour les monuments disparus. Enfin, le quatrième livre comprend l'histoire littéraire de Montdidier. Ces livres trois et quatre forment le troisième et dernier volume. Nous allons examiner successivement ces quatre livres, avec l'attention et dans le détail que l'ouvrage mérite.

Dans le premier des seize chapitres qui composent son premier livre, l'auteur traite de l'aspect et de la situation de Montdidier. Cette ville, dit-il, est bâtie sur le penchant d'une montagne calcaire, dont la pente principale regarde le midi. Au nord et à l'ouest, la montagne sur laquelle notre cité s'élève est très-escarpée ; en quelques endroits même elle est entièrement à pic. Cet escarpement n'est pas simplement l'ouvrage de la nature, il est dû encore à la main de l'homme, qui, pour augmenter en temps de guerre ses moyens de défense, a combiné habilement les ressources de l'art avec les accidents du terrain.

« Au levant, une plaine fertile s'étend jusqu'au Santerre ; au couchant coule la rivière des Trois-Dom, qui prend sa source à peu de distance, et sépare la ville d'une partie des faubourgs. »

« La position de Montdidier sur une montagne a toujours été un obstacle à son agrandissement ; les abords en étaient roides, dangereux : des travaux de rectification récemment exécutés les ont rendus plus faciles aux voitures. »

« L’intérieur de la ville se ressent de cette situation : le terrain y est rare ; les maisons manquant d'espace, elles se pressent, s'élèvent en amphithéâtre, serrées les unes au-dessus des autres ; très-peu ont un jardin ; beaucoup n'ont point de cour. Les rues sont généralement en pente et d'un parcours désagréable. »

« L'aspect de Montdidier est celui de toutes les petites villes, calme et monotone ; peu ou point de mouvement ; les jours de marché seulement, la vie s'y fait sentir. » Maintenant, écoutons l'auteur nous décrire l'aspect de sa ville, qu'il connaît si bien :

« Malgré les améliorations effectuées dans ces derniers temps, Montdidier, comme bien d'autres villes, gagne plus à être vu de loin que de près. De quelque côté qu'on y arrive, l'œil flatté se repose avec plaisir sur un tableau agréable. Vient-on par la route d'Amiens, le collège offre son architecture sévère, ses jardins en terrasse et ses groupes d'arbres verts ; sur la droite, les ruines de la tour à Blocailles, et quelques débris informes de ces murs qui bravèrent si longtemps l'effort de l'ennemi. Du côté de Saint-Just et de Tricot, la ville se présente en amphithéâtre : c'est une multitude de toits, de fenêtres, de lucarnes où l’œil se perd, s'égare ; où tout se mêle, se confond ; l'habitant le plus exercé cherche vainement dans ce chaos pittoresque à reconnaître sa demeure. La place coupe la ville en deux parties égales ; on voit la vie arriver à cette grande artère, et de là se répandre dans les différents quartiers ; les clochers des églises s'élèvent graduellement l'un au-dessus de l'autre, et le sombre profil du palais de justice forme l'extrémité du tableau. »

« Mais c'est surtout en venant par la route de Breteuil que l'aspect est vraiment remarquable. Montdidier se déploie dans toute sa longueur, couronnant fièrement la montagne, qui, de ce côté, est taillée à pic. La ville va en montant du sud au nord : le plan inférieur est occupé par la vallée dont les arbres touffus cachent les habitations des faubourgs. Une rangée de belles maisons, précédées de jardins en terrasse, d'où l'on jouit d'un horizon immense, se dessine sur le haut de la montagne. Des massifs de verdure s'étendent le long des anciennes murailles, s'enfoncent dans le creux du rocher, ou s'élancent jusqu'au faite des vieilles fortifications; de petites maisons, qu'on dirait suspendues dans l'espace, se montrent et disparaissent dans le feuillage. Le dôme de Saint-Pierre, le campanile à jour de l'hôtel de ville, le clocher de l'église du Saint-Sépulcre et le blanc sommet de son nouveau portail ressortent dans le tableau, et laissent croire que la ville se prolonge bien loin, renfermant dans son sein de nombreux habitants. Le spectateur aperçoit à sa gauche le faubourg Becquerel, dont les habitations superposées semblent se séparer du rocher et se précipiter dans la vallée ; au-dessus, la masse imposante du tribunal avec son antique façade de grès, sa tourelle, ses fenêtres ogivales, ses lourds contreforts et son large pignon : à son air altier on reconnaît la salle du Roi. La promenade du Prieuré, avec ses épaisses allées de tilleuls, termine merveilleusement le paysage. »

C'est là le Montdidier actuel. Mais M. de Beauvillé démontre que la ville ancienne était beaucoup plus considérable, et qu'en outre de l'emplacement de la ville moderne, elle occupait encore tout l'espace compris entre la montagne où est bâti Montdidier et la colline qui borde la vallée du côté du Mesnil-Saint-George. Dès le douzième siècle il y avait à Montdidier cinq églises, et, du temps de Philippe-Auguste, qui la réunit à la couronne, on y comptait deux mille maisons. Aujourd'hui il n'y en a que mille trente et une. Au dix-septième siècle, on y comptait encore quatre portes, celles du Saint-Sépulcre ou de Paris, de Becquerel, d'Amiens et de Roye. Anciennement il y en avait une cinquième, celle de Noyon, qui fut détruite sur la fin du quatorzième siècle. Les murailles étaient défendues par des tours, dont M. de Beauvillé a su retrouver les noms et la situation, et même, pour quelques-unes, la date de leur construction. Au reste il ne fait pas remonter les fortifications de la ville au delà de Louis XI, et il nous apprend que Montdidier est une des premières villes où l'on ait fait usage d'artillerie de siége.

Dans son second chapitre, M. de Beauvillé s'occupe de l'étymologie de Montdidier, et d'abord il se demande ai c'est bien là le Bratuspantium de César. Il en doute, et, nous l’avouerons, nous aimons la manière toute vive, et qu'on nous passe l'expression, toute picarde, avec laquelle il aborde la question.

Montdidier est-il l'antique Bratuspantium dont parle César ? C'est une question dont la solution sera toujours incertaine. Lorsque César écrivit sa relation de sa campagne des Gaules, il ne se doutait pas des difficultés qu'il préparait aux antiquaires, des dissertations interminables auxquelles donnerait lieu le moindre mot échappé de son stylet. Si ses Commentaires ont jeté un grand jour sur la géographie ancienne de la France, il faut convenir aussi que, grâce aux notes et aux remarques sans nombre dont les traducteurs ont surchargé son ouvrage, on est presque arrivé à mettre tout en doute et à ne plus s'y reconnaître. Pour ne citer que ce qui concerne notre pays, avant qu'on soit d'accord sur la position de Samarobriva, de Portus-Itius, de Bratuspantium, etc., les villes qui ont aujourd'hui la prétention d'occuper l'emplacement de ces antiques cités auront elles-mêmes disparu du sol, et peut-être un jour discutera-t-on sur leur existence, comme l'on discute sur l'existence de celles qui les ont précédées. » Il va sans dire après cela que M. de Beauvillé rejette bien loin le Bratuspanlium de César. Au reste, il se déclare hautement pour la tradition qui veut que Montdidier ait pris son nom de Didier, roi des Lombards, relégué par Charlemagne dans le monastère de Corbie, lieu assez voisin de Montdidier. « La conformité parfaite, dit-il, qu'il y a entre le nom de notre ville et celui de ce monarque justifie pleinement la tradition locale Mons-Desiderius ; Urbs-Desiderii, la ville ou le mont de Didier. Cette étymologie est la seule acceptée par tous les chroniqueurs montdidériens. » Et plus loin : « Pour résumer ce qui a rapport à l'origine de notre ville, nous pensons qu'elle n'est pas le Bratuspantium des anciens, que ce ne fut point un palatium des rois francs, qu'elle ne s'est jamais appelée les Tournelles [Contrairement à une opinion avancée par du Cange, opinion que l'auteur réfute victorieusement] ; nous croyons que sa fondation remonte au huitième siècle ; qu'il y avait alors à l'endroit qu'elle occupe une métairie ou un domaine relevant de l'abbaye de Corbie, dans lequel Didier fut renfermé. Des maisons se seront groupées à l'entour, et en se multipliant elles auront donné naissance à la ville ; mais dire quel était son nom, ou, pour parler plus exactement, comment s'appelait ce qui en tenait lieu avant que Didier y séjournât, nous en sommes à cet égard réduit aux conjectures, et nous répéterons avec le commentateur de la Villette, notre compatriote et parent : C’est une chose à deviner plutôt qu'à résoudre. »

Après avoir traité dans ses deux premiers chapitres de tout ce qui concerne les origines de sa ville, l'auteur entre dans le récit des événements qui s'y sont passés, depuis les premiers temps connus jusqu'à nos jours. Il commence par nous parler des premiers comtes de Montdidier, ceux que l’on pourrait appeler de la première race. Il en admet quatre, tous quatre ayant porté le nom d'Hilduin. Grâce à une discussion habile des témoignages trop souvent insuffisants et contradictoires de ces époques reculées qu'il a recueillis, il parvient à fixer, au moins approximativement, plusieurs dates importantes. C'est ainsi qu'il place la mort d'Hilduin Ier, le premier des Comtes de Montdidier, entre les années 948 et 956 ; celle d'Hilduin II, son fils, à l'an 992, rectifiant ici l'Art de vérifier les dates, qui fait mourir ce personnage en 1030. Hilduin II eut pour successeur son fils, Hilduin III qui mourut en 1033, laissant son comté à son fils Hilduin IV. Sous ce dernier, Raoul de Crépy s'empara de Montdidier. A quelle époque ? c'est ce qu'il serait très-important de savoir ; mais, malheureusement, malgré toutes ses recherches, M. de Beauvillé nous avoue franchement qu'il n'a pu la découvrir. Ce qu'il y a de sûr, c'est que Raoul de Crépy mourut à Montdidier le 8 septembre 1074. On y voit encore aujourd'hui son tombeau. Simon de Crépy, son fils, qui hérita du comté de Montdidier, se fit moine. On a des exemples du même fait : en 1151, Mathieu Ier, comte de Beaumont-sur-Oise, se fit moine dans le prieuré de S. Léonore qui était compris dans l'enceinte de son château. De Simon de Crépy le comté de Montdidier passa dans la maison de Vermandois, puis dans celle des comtes de Flandre, et tomba enfin dans les mains de Philippe-Auguste. Voici comment M. de Beauvillé résume ces changements successifs. « Pendant trois cents ans environ que le comté de Montdidier fut séparé de la couronne, il fut possédé successivement par cinq familles différentes. La première fut celle d'Hil­duin et des comtes de ce nom ; le comté passa dans la maison de Valois par l'usurpation de Raoul de Crépy, ensuite dans celle de Vermandois, puis dans celle de Vermandois-France, enfin il devint la propriété du comte de Flandre. La succession masculine fut fréquemment interrompue, et c'est presque toujours par suite d'alliances que le comte de Montdidier devint le partage des familles dont nous venons de parler. »

De Philippe-Auguste à nos jours, le cadre des événements peut paraître un peu grand pour être rempli par une seule ville, et encore une petite ville. On s'attend naturellement à un peu de vide, et le lecteur le plus bienveillant fait provision d'indulgence. Cependant la chose n'eut pas toujours nécessaire. On peut quelquefois s'en passer, et nous croyons que c'est le cas pour le livre dont nous parions. Non pas qu'entraîné par notre sujet, nous voulions prétendre ici que Montdidier ait joué l'un des premiers rôles sur le théâtre des grands événements de notre histoire ; ce serait trop dire, car, à part son incorporation à la couronne sous Philippe-Auguste, son alliance intime avec les ducs de Bourgogne, ses quatre sièges soutenus avec courage, et quelques faits militaires brillants, c'est au fond une petite ville modeste et qui a fait peu parler d'elle. Ce qui n'empêche pas pourtant qu'elle n'ait eu sa vie propre, participant toujours, plus ou moins, de la grande vie commune, et dont on suit avec intérêt les phases et les développements successifs dans l'habile historien qu'elle a trouvé. Citons quelques faits à l'appui. En 1118, Montdidier est donné en dot, avec Roye et Péronne, à Michelle de France, qui épousait Philippe le Bon, alors comte de Charo­lois. M. de Beauvilié a soin de remarquer que ce fut à cette époque que commença la réunion des trois villes de Péronne, Montdidier et Roye en un gouvernement distinct de celui de Picardie. Après avoir parlé du traité d'Arras (1435) et des suites qu'il eut pour Montdidier, M. de Beauvillé nous fait connaître un fait de détail, mais qui a son importance. Il vient de parler de ce qui s'était passé en 1438. « L'année suivante, Charles d'Artois, comte d'Eu, gouverneur de Picardie pour la partie que le traité d'Arras avait laissée au roi, et Jean de Bourgogne, comte d'Etampes, gouverneur de la même province pour les villes cédées à Philippe le Bon, se réunirent à Montdidier, le 24 juillet, afin de régler les contestations qui s'étaient élevées au sujet des limites de leurs gouvernements respectifs, et le 16 novembre ils signèrent dans cette ville un accord destiné à mettre un terme à ces difficultés. » Voici comment il parle d'un grave incendie qui survint dans la ville en 1470 : « Un fléau non moins destructeur que la guerre vint frapper nos ancêtres. Le dimanche 18 mai 1470 un incendie terrible détruisit toute la ville ; les portes et les ponts-levis furent brûlés ; il n'y eut d'épargné que l'église de Notre-Dame, celle de Saint-Pierre, la salle du roi et dix-huit maisons ; plusieurs habitants périrent dans les flammes en voulant sauver leurs biens. L'hôtel de ville fut consumé, les titres originaux et les papiers de la commune disparurent dans l'embrasement universel : on fut cependant assez heureux pour préserver de ce désastre le Livre Rouge, où l'on transcrivait la titres et les documents qui intéressaient la ville. Singulière destinée ! trois siècles après, ce même livre, auquel nos aïeux attachaient une si grande importance et qu'ils arrachaient des flammes au péril de leur vie, devait être brûlé sur la place de Montdidier, aux acclamations d'une populace insensée. » En 1475, Montdidier, sommée par Louis XI, se rend, et est aussitôt livrée aux flammes. « La conduite de Louis XI, dit M. de Beauvillé, fut indigne d'un roi : il viola ses engagements et faussa sa parole comme ne l'eût point fait le dernier chevalier de son armée... »

« Ce fut le 10 mai 1475 que Louis XI ordonna de mettre le feu à Montdidier : à aucune époque notre ville n'éprouva un désastre aussi complet ; il surpassa l'incendie de 1470. Le roi se montra impitoyable : ce que les flammes épargnèrent, il le fit détruire. Jamais on n'exerça de vengeance plus cruelle envers des vaincus, il ne resta pas une seule maison debout ; notre malheureuse cité fut rasée au niveau du sol. »

Ici, en remplissant son devoir d'historien, M. de Beauvillé incrimine hautement la conduite de Péronne, qui profita sans pitié du malheur de sa rivale. Puis il termine ce chapitre remarquable par les réflexions suivantes :

« Jamais il n'y eut pour notre pays d'époque plus féconde en événements lamentables que le quinzième siècle. Les maux qui affligèrent nos aïeux allèrent toujours croissants ; néanmoins, durant cette longue suite de calamités, leur fidélité ne se laissa jamais ébranler, elle sembla grandir avec l'adversité et puiser de nouvelles forces dans les revers ; toujours ils furent attachés au duc de Bourgogne, dont ils avaient librement embrassé la cause, sans que la mauvaise fortune de Charles le Téméraire vint un seul instant affaiblir l'attachement qu'ils avaient juré à sa famille. Pendant le régne de ce prince, que n'eut point à souffrir notre ville, et à quelles cruelles vicissitudes ne fut-elle pas condamnée ? Prise et reprise quatre fois, incendiée deux fois, elle finit par être détruite à ras de terre, et l'on aurait pu passer la charrue sur la place qu'elle occupait. Vainement y chercherait-on quelques restes d'antiquités : tout disparut à cette époque désastreuse. Malgré son ancienneté, Montdidier n'offre rien d'intéressant aux regards des curieux : ce n'est qu'une ville de la fin du seizième siècle, une cité neuve avec les apparences de la vieillesse ; aussi, à l'exception du palais de justice et de quelques parties insignifiantes de l'église Saint-Pierre, on n'y voit aucune construction antérieure à 1475, année de funeste mémoire. »

La réforme s'introduisit de bonne heure dans Montdidier. Un disciple de Calvin, Michel de la Grange, y fut brûlé le jeudi saint de l'année l556 Voici ce qu'en dit M. de Beauvillé. « La ville de Montdidier, voisine du lieu où Calvin reçut le jour (à Noyon), fut une des premières où les nouvelles idées religieuses comptèrent des partisans. Des émissaires de la religion réformée parcouraient le pays, distribuant les écrits des ministres et resserrant les liens qui unissaient les néophytes au réformateur. Un des envoyés venu de Genève, Michel de la Grange, natif de Meaux, fut arrêté à Montdidier. On lui fit son procès. Par sentence d'Antoine de Bertin, lieutenant général au bailliage, il fut condamné à être brûlé vif au milieu du marché, pour avoir vendu et distribué dans la ville plusieurs livres de Calvin, de Bèze et autres novateurs. Ce jugement déplorable fut exécuté. Le jeudi saint 1555, la veille du jour où Jésus-Christ était mort sur la croix, le bûcher s'alluma sur la place de Montdidier pour consumer un malheureux égaré ; les écrits de Calvin et de Bèze furent attachés de la main du bourreau aux carrefours de la cité. Cette justice terrible effraya les religionnaires, et pendant plusieurs années ou n'en entendit plus parler. »

Nous ne pousserons pas plus loin l'examen de ce premier livre. Ce que nous en avons dit, et surtout les citations que nous avons multipliées à dessein, suffiront pour donner une idée de la méthode et de la manière de l'auteur. On a déjà pris goût, nous l'espérons du moins, à sa franchise et à sa passion d'historien. Au reste, ces qualités, qui le suivent dans tout te récit, deviennent plus saillantes quand il en arrive aux temps modernes. Aussi, à partir de là, son œuvre, toujours intéressante pour le lecteur ordinaire, doit avoir un prix tout particulier pour des compatriotes ; car on y sent à chaque page un esprit sain et vif, un cœur chaud et des vues de bon citoyen.

Le second livre de l'Histoire de Montdidier donne un tableau complet de la ville. Il est divisé en neuf chapitres : 1° Église Saint-Pierre ; 2° Église du Saint-Sépulcre ; 3° Mairie ; 4° Organisation judiciaire et administrative ; 5° Instruction publique ; 6° Établissements de charité ; 7° Commerce, Industrie, Agriculture, Routes, Foires. etc. ; 8° Promenades, Jeux, Divertissements, Société ; 9° Statistique, Mélanges.

L'église Saint-Pierre dépendait du prieuré de Notre-Dame de Montdidier, dont nous aurons l'occasion de parler plus loin. Elle est mentionnée pour la première fois dans une charte de l'an 1146, mais elle existait dès le onzième siècle.  On ignore où était située cette première église. Celle qui subsiste ne date que de la fin du quatorzième siècle, et même elle a été bien longtemps à s'achever, puisque ce ne fut qu'en 1538 qu'on jeta les fondations du portail qu'on voit aujourd'hui. « La disposition, dit M. de Beauvillé, en est très-simple ; elle consiste en deux tours ou gros plliers-butans réunis par une galerie ; une voûte en cul-de-four, assez profonde, abrite le timpan, deux portes séparées par un trumeau sculpté donnent accès dans l'intérieur. » Nous ajouterons que la planche qui accompagne le texte donne l'idée d'un travail élégant et remarquable. Ce portail, à ce qu'il paraît, ressemble beaucoup à celui de la cathédrale de Beauvais ; ce qui est tout simple, puisque M. de Beauvillé nous apprend qu'il a été fait par un maître-d'œuvre, nommé Chappion, qui travaillait alors à cette dernière église. L'église de Saint-Pierre renferme le monument historique le plus curieux que possède la ville de Montdidier. Nous voulons parler de la tombe de Raoul de Crépy, comte de Montdidier. Voici ce qu'en dit l'auteur. « Le costume est d'une exactitude incontestable, et la ressemblance aussi parfaite que possible. Raoul, ainsi que le rapporte Guibert de Nogent, ayant fait faire son tombeau de son vivant, on peut dire sans-exagération qu'il a posé pour l'exécution de la statue qui se trouve dans l'église Saint-Pierre : aussi a-t-elle une valeur qui lui est propre, et est-elle digne à tous égards de fixer l'attention des antiquaires. » Plus bas, il ajoute : « On doit apporter le plus grand soin a la conservation de la tombe de Raoul ; c'est, comme objet historique, ce que la ville possède de plus curieux ; il serait urgent que la fabrique le fit entourer d'une grille, et l'on est surpris que cette mesure de précaution n'ait pas été déjà adoptée : devons-nous supposer que le mérite archéologique de cette tombe n'est point compris ? Les monuments funéraires du onzième siècle sont extrêmement rares ; notre pays n'en possède aucun autre : dans toute la Picardie ou ne pourrait peut-être pas en citer un seul aussi ancien, aussi bien conservé, et auquel se rattachent autant de souvenirs que celui dont nous venons de parler. » Outre la tombe de Raoul, l'église Saint-Pierre possède encore quelques objets dignes d'être cités. D'abord, la châsse des saints Lugle et Luglien, deux saints tres légendaires, un roi et un évêque, assez peu connus, historiquement parlant, mais qui n'en jouissent pas moins, à Montdidier, d'un très-grand crédit, à ce point, dit M. de Beauvillé, que le peuple y a plus de confiance en saint Lugle et saint Luglien qu'en Dieu lui-même. Ensuite, des fonts baptismaux remarquables, que M. de Beauvillé croit du onzième siècle, et qu'il décrit ainsi : « Les fonts baptismaux sont fort anciens et offrent tous les caractères du style byzantin uni au style roman. La cuve est creusée dans un bloc de marbre de Tournay, de 1m,6 de largeur sur lm,8 de longueur et 0m,27 d'épaisseur ; elle repose sur un gros pilier rond de même marbre, orné seulement de deux moulures grossières. Aux quatre angles de la cuve il y avait anciennement des colonnes, courtes et grosses, s'appuyant sur une base carrée de marbre ; on en voit encore les traces ; on les a remplacées en 1853 par des colonnettes de bois. La hauteur des fonts est de 1m,3. Les quatre angles formés par l'excavation de la cuve sont remplis de sculptures représentant des animaux fantastiques, des oiseaux entourés de feuillage, une tête d'homme et une croix. Deux des quatre faces latérales figurent un portique composé de huit arcades à plein cintre, séparées par des colonnettes alternativement torses et droites, à chapiteaux cubiques. L'intervalle entre les colonnes paraît avoir été gratté ; peut-être renfermait-il quelques petits personnages. Sur le troisième côté, on voit un cep de vigne, et sur le quatrième, le Christ enseignant ; des grappes de raisin sont sculptées à l'entour. » Parmi les autres objets que contient l'église dont nous parlons et qui sont décrits dans ce chapitre, nous mentionnerons deux verrières, l'une du seizième siècle, qui représente la Transfiguration, et l'autre, qui est moderne. Cette dernière décore la chapelle de la Vierge. Elle a été donnée par le frère de l'auteur, qui a renouvelé un don fait par la famille, comme on le voit par cette inscription : verrinas . ab . avo . donatas . mdcxliv — impiis . manibus . effractas . mdccxciii — nepos . restituendas . curavit — anno . ab . incarnat . dni . mdccclvi. Dans l'ouvrage, ce chapitre, consacré à l'église Saint-Pierre, est accompagné d'un plan de l'église, d'une vue pittoresque en 1740, d'une autre prise aujourd'hui, et de trois autres planches représentant la tombe de Raoul, les fonts baptismaux et les deux verrières dont on vient de parler. Il est terminé par une liste des cures de Saint-Pierre à partir de l'an 1400.

L'église du Saint-Sépulcre est, comme celle de Saint-Pierre, mentionnés dans la charte de 1146 dont nous avons parlé. Il y a eu sous ce nom une première église, qui se trouvait située au bas de la ville, en dehors de l'enceinte de Philippe-Auguste. Elle disparut dans les premières années du quinzième siècle, probablement pendant le siége que Jean-sans-Peur mit devant Montdidier en septembre 1411, siége qu'il fut forcé de lever brusquement par suite de la défection des Flamands qui formaient une partie de son armée. La seconde église date de 1419, et cent ans après on en construisit une troisième, qui est celle qui subsiste aujourd'hui, sauf pourtant le portail, qui a été refait de nos jours (1853-1855) à l'aide des dons volontaires des habitants. « Ce beau portail, dit M. de Beauvillé, a été exécuté sur les plans et sous la direction de M. Herbault, architecte du département ; il lui fait infiniment d'honneur : c'est une imitation très-heureuse du style fleuri flamboyant, et l'une des rares productions modernes où l'on ait combiné avec bonheur leu règles du goût avec l'application exacte des formes architectoniques d'une autre époque. » Cette église possède une fort belle chaire, des fonts baptismaux de la renaissance, qui portent la date de 1539, et un Ecce Homo en pierre d'un fort beau travail, qui surmonte la chapelle consacrée au Saint-Sépulcre. On y voit encore dans le chapelle des Romanet, famille de Montdidier, un tableau représentant saint Nicolas, évêque de Myre, qu'un père vient remercier d'avoir sauvé l'honneur à ses trois filles, tableau que la tradition du pays attribue à Lesueur, et qui lui aurait, dit-on, été commandé par le poète Jean Racine, qui, comme on sait, avait épousé une Catherine Romanet. M. de Beauvillé ne partage pas cette opinion, et ii faut lui savoir gré de son impartialité d'historien, car il eût pu facilement, s’il l’eût voulu, laisser dans l'ombre les arguments victorieux qu'il fait valoir contre la tradition admise.

L'hôtel de ville subsista dans la vallée jusqu'au quinzième siècle. Détruit en 1475, lors de la cruelle exécution ordonnée contre Montdidier par Louis XI, il était rebâti en 1484. Il fut brûlé par le duc de Norfolk en 1523, et rétabli l'année suivante. « C'est, dit M. de Beauvillé, un bâtiment de brique et pierre, à bossages, d'assez mauvais goût, qui rappelle les maisons de la place Royale à Paris. » Dans ce chapitre, l’auteur nous apprend qu'à Montdidier l'année commençait au 25 mars. Il donne une liste des maires de Montdidier qu'il a pu faire remonter jusqu'à l'an 1196. Dans le chapitre suivant, en parlant du palais de justice il dit que la voûte, qui en est la partie la plus ancienne, est peut-être le seul vestige du château des comtes de Montdidier. Nous ne nous occupons ici ni du collége, ni des établissements de bienfaisance, ni d'une foule d'autres objets qui sont très au long et très-bien traités dans ce second livre. Ce sont des objets d'intérêt tout local. Nous signalerons cependant un article très-intéressant sur un projet de canalisation de la petite rivière qui coule à Montdidier. Cette rivière s’appelle les Trois-Dom, et voici pourquoi, d'après l’auteur : « La rivière qui coule à Montdidier prend sa source à Dompierre (Oise), lieu dit le Petit-Pré, au-dessous de l'église ; elle passe ensuite à Domfront et à Domélien, et c'est à cette succession des trois villages dont le nom commence par la même syllabe, qu'elle doit de s'appeler rivière des Doms ou des Trois-Dom. » Ne serait-il pas plus naturel de renverser la proposition et de dire que c'est la rivière, que c'est le Dom qui a donné le nom à ces trois villages ? Et en effet, l'analogie est si marquée pour Dompierre, la pierre, c'est-à-dire évidemment la source du Dom, Domfront, le lieu qui fait face au Dom. Quant à Domélien, qui s'en écarte un peu, on peut fort bien lire Domelieu ou Domlieu. A la vérité, M. de Beauvillé cite un titre de l'an 1800 qui paraît le convaincre que la rivière en question s'appelait alors, non pas le Dom, mais Becquerel. Voici le passage : « Le nom des Trois-Dom que porte la rivière ne remonte pas à une époque très-reculée. Dans de vieux titres elle est désignée sous le nom de rivière de Becquerel, de Couppin ou Couppy. Le dénombrement de la terre de Royaucourt, fourni en 1300 par Pierre de Séchelles, écuyer, seigneur de Royaucourt, porte : Item, à Dommelien trois journeux de pré ou environ à la rivière qui commence que on dit Becquerel et donne jusques à la maison l'abbé Sainct Quentin. Or la rivière des Dom est la seule qui passe à Domélien, et l'abbé de Saint-Quentin de Beauvais était effectivement seigneur de ce village. » Rien de mieux ; mais cela ne prouve pas suffisamment, suivant nous, que le passage allégué dise clairement que la rivière s'appelât Berquerel. Bien loin de là. Nous croyons que par ces mots : la rivière qui commence que on dit Becquerel, il faut entendre, la rivière qui commence au lieu que on dit Becquerel, par une tournure elliptique très-fréquente dans les textes de cette époque. Vous en avez la preuve dans la phrase citée elle-même : la maison l’abbé de Sainct-Quentin, pour : la maison de l'abbé de Saint-Quentin. Au reste, alors même qu'on nous apporterait des textes plus probants encore pour montrer que la rivière s'est appelée ou Becquerel, ou Couppin, nous n'en persisterions pas moins dans notre opinion, et nous dirions que ce sont les textes, eux, qui ont eu le tort d'oublier le vrai nom, le nom primitif, dont nous ne pouvons voir dans Dompierre, Domfront et Domlieu, que des dérivés.

Après nous avoir montré dans son deuxième livre l'état actuel de Montdidier, M. de Beauvillé nous donne dans le troisième le tableau de l'ancien Montdidier. Il nous parle d'abord du prieuré de Notre-Dame, dont l'origine se confond avec celle de la ville, et qui fut réuni vers 1130 à l'abbaye de Cluny. Il passe ensuite aux paroisses supprimées de Saint-Médard et de Saint-Martin, et aux chapelles de Sainte-Catherine et de Notre-Dame de Boulogne. De là aux établissements hospitaliers, tels que l'Hôtel-Dieu, l'hôpital, la Maladrerie, etc. Puis les couvents : un d'hommes, les Capucins, et deux de femmes, les Franciscaines et les Ursulines. Vient ensuite un chapitre important sur les anciennes juridictions de Montdidier : la prévôté, qui est la plus ancienne, puis le bailliage, l'élection, le grenier à sel, etc. Il termine par une liste des gouverneurs généraux et particuliers de Montdidier.

Le quatrième et dernier livre est consacré à l'histoire littéraire de la ville. Il se compose, d'abord d'une biographie des personnages célèbres qui ont vu le jour à Montdidier. On peut y citer, entre autres : pour les noms historiques, Hugues des Payens, le fondateur de l'ordre des Templiers, que l'auteur réclame pour sa ville, contre des prétentions soutenues par d'autres écrivains ; Robert le Cocq, l'ambitieux évêque de Laon, l’âme de la révolte de 1358, comme Estienne Marcel en est le bras ; la Tournelle, ancienne et illustre famille du pays ; Aubry de Montdidier, si connu par la légende de son chien qu'on a transformé en champion de champ clos, etc. Parmi les noms littéraires, le grand médecin Fernel, le docte Adrien de la Morlière, l'érudit Caperonnier ; le gracieux peintre Rioult, et d'autres. Toutes ces biographies sont bien faites et méritent d'être lues. Mais il en est une qui tranche sur les autres et qui mérite une attention particulière : c'est celle de l'homme qui a tant contribué par ses travaux et ses écrits à l'amélioration de l'alimentation du peuple, nous voulons parler du savant et modeste philanthrope Parmentier. Il n'était guère possible que l'auteur de l'Histoire de Montdidier, qui aime tant tout ce qui se rattache à sa ville, eût oublié l'un de ses plus illustres enfants ; aussi lui a-t-il fait dans son livre une noble et large part. Il faut lire encore, au premier livre de l'ouvrage, ce qu'il dit de la cérémonie de l'inauguration de la statue de Parmentier, cérémonie qui s'est accomplie, à ce qu'il paraît, avec un peu trop de fracas d'une part, et un peu de tiédeur de l'autre. Il y a là une page charmante. C'est l'humeur de Saint-Simon, mais moins amère, et surtout plus légitimée.

A la suite de la partie biographique, le troisième livre contient encore une partie bibliographique. On y trouve tout ce qui a été écrit sur Montdidier. A la vérité, ce n'est guère que des brochures ou de petits traités séparés. A proprement parler, le seul livre est l'histoire de Montdidier du P. Daire, petit in-12, actuellement fort rare.

L'Histoire de Montdidier est accompagnée d'un grand nombre de pièces justificatives. Nous en signalerons quelques-unes. Par exemple, un État et devis des fortifications exécutées à Montdidier sous Philippe-Auguste ; la Vente en 1289 par le seigneur de la Tournelle de tous les droits de justice et autres qui lui appartenaient dam la ville de Montdidier ; deux ordonnances de police fort curieuses, publiées en 1433 par le maïeur de Montdidier ; l'Inventaire de l'artillerie que possédait la ville en 1553 ; les Doléances de la paroisse d'Ayencourt, près Montdidier, faites en 1789, pièce d'un grand intérêt historique ; des Renseignements sur Babeuf ; des Projets de canalisation des rivières d'Avre et du Dom, etc. Toutes ces pièces, au nombre de cent vingt-trois, proviennent, soit des archives et bibliothèques publiques, soit du cabinet de l'auteur. L'ouvrage est terminé par une table chronologique des pièces et par une table générale des matières. Il est enrichi d'un plan de Montdidier et de vingt-huit planches, dont voici l'indication, vo­lume par volume :

Le premier volume renferme quatre planches, savoir : 1° Une vue de Montdidier ; 2° le sceau de Raoul de France, comte de Vermandois et de Montdidier ; 3° le sceau et contre-sceau de Philippe d'Alsace, comte de Flandre, de Vermandois et de Montdidier; 4° la statue de Parmentier. Le second volume a dix-neuf planches, dont huit pour l'église Saint-Pierre seule, et cinq pour l'église du Saint-Sépulcre, y compris le plan des deux églises. Les autres planches représentent l'hôtel de ville, le palais de justice et le collége. Le troisième volume a en tête une vue de Montdidier en 1740, un portrait d'Adrien de la Morlière, les médailles de Fernel et de Parmentier, enfin les sceaux du prieuré de Notre-Dame, et ceux de Robert et Guillaume de la Tournelle.

Maintenant que nous avons suffisamment fait connaître le contenu du livre, il nous sera plus facile de formuler notre jugement sur sa valeur. C'est, à nos yeux, une excellente histoire de ville, et précisément du genre de celles que nous demandions en commençant. Dans le premier livre, le récit des faits, un peu rares et clairsemés par le nature même du sujet, est habilement rattaché aux faits généraux, en sorte que, bien que placés au point de vue borné d'une petite ville, nous n'en entrevoyons pas moins toujours à l'horizon les grands événements de l'histoire. Philippe Auguste, les ducs de Bourgogne, Louis XI, la Réforme, la Ligue, la Fronde, la Révolution ne passent pas impunément sans s'arrêter quelque peu ici, et tans y laisser quelque empreinte. Quant au reste de l'ouvrage, tout ce que la ville a eu dans son passé, tout ce qu'elle possède maintenant en fait de monuments ou d’institutions, d'hommes ou de choses, y est patiemment recherché, curieusement décrit, sainement jugé. L'auteur ouvre son livre par ces paroles  modestes : « J'aurai atteint le but que je me propose, si ce travail procure sans peine des renseignements exacts sur les faits accomplis à Montdidier, sur les édifices et les établissements que renferme cette ville, et sur les hommes distingués qu'elle s'honore d'avoir vus naître. » Nous qui avons lu attentivement l'Histoire de Montdidier, nous avons le droit de dire à son savant auteur : Vous avez atteint votre but et au delà, car vous avez consacré une partie de votre vie à élever à votre ville un monument qui subsistera, stat mole sua, et vous avez doté la branche de littérature de l'histoire locale, d'un bon livre de plus.

L. Douet-d’Arcq.

Accès à l'Histoire de Montdidier de Victor Beauvillé

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