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Histoire de Montdidier
Livre IV - Chapitre II - Section XXXIII

par Victor de Beauvillé

GOULLIART (Pierre-Louis), ou GOUILLARD, car son nom s'écrivait de deux manières, naquit à Montdidier, le 26 août 1731 ; son père, Pierre Goulliart, était marchand, fabricant de bas au métier ; sa mère se nommait Gabrielle Clément. Goulliart perdit son père de bonne heure et fut élevé par les soins de son oncle, Jacques Goulliart, principal du collége de Montdidier et curé du Saint-Sépulcre. L'oncle, destinant son neveu à l'état ecclésiastique, le fit entrer dans un séminaire de Paris, mais le jeune homme n'avait pas la moindre vocation religieuse entraîné par ses passions, il abandonna la théologie, et quitta la soutane pour épouser une actrice appelée Sauvage.

Furieux d'un pareil changement, le curé du Sépulcre ne voulut plus entendre parler de son neveu, et rompit toute relation avec lui. Goulliart se trouva dans une situation très-précaire, mais il avait de l'intelligence et parvint à se créer des ressources. Il se livra avec ardeur à l'étude du droit et se fit recevoir avocat ; mais, au lieu de suivre la carrière du barreau, il préféra s'adonner au travail du cabinet et à l'examen approfondi des lois. Le haut enseignement fut le but vers lequel il dirigea ses efforts ; reçu agrégé, puis professeur à l'École de droit de Paris (1778), il en était doyen lorsque éclata la Révolution.

La réputation de Goulliart attirait autour de sa chaire un nombreux auditoire ; les leçons particulières et les consultations qu'il donnait le mirent dans une excellente position. Il se lia intimement avec plusieurs hommes de lettres, notamment avec François (de Neufchâteau). Parvenu à la fortune, il disait en riant qu'il s'était marié avec quinze livres (libri) et qu'il en avait trente mille... de rente.

La Révolution vint fermer les écoles et briser la carrière de Goulliart. Il avait toujours vécu largement, sans s'inquiéter de l'avenir, et mené une conduite dissipée, ce qui, pour un professeur, était encore plus répréhensible : chez lui les années n'avaient point calmé le feu des passions, et jusque dans un âge avancé il conserva l'emportement de la jeunesse. Du vivant même de sa femme, il entretenait des relations avec une fille Deschamps, qui occupait un appartement au-dessus du sien ; elle lui vint en aide dans les jours d'infortune.

François (de Neufchâteau) vivait avec une ancienne figurante du Palais-Royal, nommée Flore, autrefois camarade de la fille Deschamps. Goulliart étant devenu veuf, cette dernière voulut se faire épouser et s'adressa à la maîtresse de François (de Neufchâteau), qui ne demanda pas mieux que d'obliger une amie. Sachant que Goulliart sollicitait une place d'administrateur des hospices de la ville de Paris, elle engagea son amant à la lui faire obtenir, à condition qu'il épouserait la femme avec laquelle il cohabitait depuis longtemps. Goulliart y consentit ; grâce à ce mariage et à la place qui en fut la conséquence, il se trouva dans l'aisance pour le reste de ses jours.

Goulliart mourut sans enfants, le 15 décembre 1800 ; il avait passé la soirée à l'Opéra ; en rentrant chez lui, il fut frappé d'une attaque d'apoplexie qui l'emporta en quelques heures.

Voici l'indication de ses ouvrages :

Lettres critiques sur la franche-maçonnerie d'Angleterre. Londres, 1773, in-8°, s. n. d'impr.

Brochure de 60 pages.

Observations sur le cahier du tiers état, relativement à l'assemblée des états généraux, par M***.

Brochure in-8° de 36 pages, publiée en 1788, sans date, lieu et nom d'imprimeur.

Lettre d'un député du district de l'Université au président du district de Saint-Laurent. Paris, septembre 1789.

Brochure in-8° de 7 pages, sans nom d'imprimeur.

Contes arabes. Paris, an vi (1798), in-12.

Nouvelle suite des Mille et une Nuits, contes arabes traduits par M. Galland, de l'Académie des inscriptions et belles-lettres, trouvée dans les papiers de ce célèbre écrivain. Paris, Cailleu, l'an vi de l'ère républicaine (1798). 2 vol. in-12.

Ces contes sont de la composition de Goulliart.

Exposition des règles du droit ancien, suivant l'ordre où elles se trouvent placées au Digeste, avec les exceptions dont elles sont susceptibles, et des observations relatives à notre nouvelle législation, par P. L. Goulliart, ancien professeur en droit et membre de la commission administrative des hospices civils de Paris. Paris, Perronneau, an vii de la République française, in-8°.

Cet ouvrage a été l'objet d'un rapport fait au conseil des Anciens, par M. Boutteville du Metz, député de la Somme, dans la séance du 19 floréal an VII. Paris, Imp. nat. in-8°, 3 pages d'impression.

Goulliart pensait à publier une suite à l'Histoire du Bas-Empire, de Lebeau, lorsque la Révolution vint interrompre ce travail ; il aurait également, m'a-t-on dit, composé plusieurs vaudevilles représentés avec succès ; cependant je n'ai jamais vu son nom figurer dans aucun répertoire, peut-être gardait-il l'anonyme ; je crois plutôt qu'il prêtait le secours de sa plume à quelques amis qui auront emporté dans la tombe le secret de cette collaboration.

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