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Histoire de Montdidier
Livre IV - Chapitre III - § IV

par Victor de Beauvillé

§ IV

VUES.

Les vues de Montdidier sont aussi rares que les cartes. La plus ancienne est celle que le P. Daire a fait graver dans son Histoire de Mondidier, d'après un dessin de Gabriel Scellier. Il est extraordinaire qu'il n'y ait pas une seule vue, pas un seul plan de la ville du seizième, du dix-septième, ni même de la première moitié du dix-huitième siècle, du moins je n'en connais aucun. Notre époque a été plus heureuse. La Description du département de la Somme, de M. Dusevel ; le Voyage dans l'ancienne France, de M. Taylor ; les Églises, châteaux et beffrois de la Picardie, par MM. Goze et autres, renferment quelques vues de Montdidier. M. Jehenne, qui a exécuté presque toutes les planches de cet ouvrage, a lithographié deux vues de la fête civique qui eut lieu le 17 juin 1849. Haut., 0m,12 ; larg., 0m,19. Il a également publié une grande planche ayant pour inscription : Hommage à Parmentier ; c'est une sorte d'apothéose de notre concitoyen. Haut., 0m40 ; larg., 0m,31. On a aussi de lui une Vue de la chapelle des saints Lugle et Luglien pendant la neuvaine. Haut., 0m,30 ; larg., 0m,22. Le nom de Montdidier figure encore, mais bien rarement, au bas de quelques lithographies médiocres qui ne laissent aucun souvenir de leur apparition éphémère.

L'exécution d'un projet, dont l'abandon est pour moi un sujet de regrets continuels, aurait popularisée le nom de notre cité et relevée le pays dans l'opinion des savants et des artistes : je veux parler de la Statistique monumentale de l'arrondissement de Montdidier. Ce projet avait été conçu par M. du Sommerard, et l'essai qu'on tentait devait servir, après sa publication, de spécimen pour une statistique monumentale qui aurait embrassé successivement tous les arrondissements de la France ; idée admirable, que la mort de l'auteur empêcha de réaliser. M. du Sommerard, connaissant MM. Rigollot et Dusevel, correspondants du Comité historique, avait pensé à eux pour l'accomplissement de son œuvre ; M. Goze, membre de ce même Comité, devait également y participer : toute latitude leur était laissée quant au choix de l'arrondissement. Comme chacun d'eux avait ses préférences, on convint, pour éviter les contestations, que le hasard en déciderait : on tira au sort, et le nom de Montdidier fut celui qui sortit de l'urne du destin, ou, pour parler sans figure, du fond d'un chapeau.

La partie artistique fut confiée à M. Louis Duthoit, qui s'en acquitta avec le talent qu'on lui connaît. Il visita les communes de l'arrondissement susceptibles d'offrir quelque intérêt, et envoya à Paris des dessins pris sur place ; mis sous les yeux du Comité, ces dessins obtinrent l'approbation universelle. M. Lemercier fut chargé de les lithographier. Le tirage à mille exemplaires se fit au mois de juin 1848 ; il aurait été peut-être plus satisfaisant s'il n'avait pas eu lieu à une époque où l'émeute portait le trouble dans les ateliers. Les frais s'élevèrent à 2,900 fr., dont 2,100 fr. pour le lithographe et 800 fr. pour M. Duthoit ; cette somme fut payée sur les fonds du ministère de l'instruction publique, la publication étant faite à ses dépens, et sur l'avis du Comité historique. C'était une bonne fortune inespérée pour notre pays. M. Dusevel rédigea le texte, qu'il adressa au Comité ; mais alors les difficultés commencèrent. Au moment où le travail était achevé, où l'on attendait impatiemment cette œuvre, depuis longtemps en voie d'exécution, des questions de personnes surgirent, des rivalités d'auteurs se firent jour, et la Statistique de l'arrondissement de Montdidier, battue en brèche, privée de défenseurs naturels, fut, malgré les efforts généreux de M. Albert Lenoir, l'un des membres du Comité, impitoyablement reléguée dans les cartons du ministère ; les planches furent mises en dépôt à l'Imprimerie nationale, où elles sont complétement oubliées. Le ministère, semblable à l'avare qui ne jouit pas de son trésor et ne veut pas qu'un autre en profite, refuse de se dessaisir de ces planches ; on les laisse se détériorer en pure perte, et il faut des prodiges de diplomatie pour s'en procurer une épreuve.

L'arrondissement de Montdidier aurait grand besoin d'être représenté en haut lieu par un homme intelligent, actif, dévoué aux intérêts du pays. Ce ne serait pas une faveur que d'obtenir la mise au jour de cette Statistique, mais bien la réparation d'une injustice qui, pour remonter à plusieurs années, n'en est pas moins déplorable : 3,000 fr. ont été dépensés par le ministère dans un but déterminé, on doit rendre compte de cet argent ou des motifs qui se sont opposés à la réalisation du projet. S'il y a des changements à opérer, rien n'empêche de les exécuter.

Cette Statistique devait d'abord être publiée avec le texte en marge des planches ; quelques exemplaires d'épreuve furent ainsi tirés ; puis on changea d'idée, et il fut résolu que le texte serait imprimé séparément et que les planches formeraient un atlas : c'est d'après ce mode que le tirage définitif a été effectué. Les planches, au nombre de treize, renferment cent trois sujets, dessinés et lithographiés à la plume ; elles ont 0m,32 de hauteur sur 0m,24 de largeur. Les communes qui figurent dans ce recueil sont : Montdidier, quatorze dessins ; Ailly, dix ; Becquigny, cinq ; Caix, quatre ; Castel, trois ; Davenescourt, cinq ; Folleville, quinze ; Guerbigny, quatre ; Harbonnières, trois ; Lawarde, quatre ; Léchelle, six ; Moreuil, neuf ; Roye, neuf, et Tilloloy, douze.

Je suis entré avec intention dans d'assez longs détails sur une publication qui ne mérite pas d'être abandonnée, et je m'estimerais très-heureux si, en attirant sur elle l'attention publique, je parvenais à inspirer à quelque ami des arts le désir de la reprendre et de la mener à bonne fin. Hoc erat in volis.

Nous avons indiqué les portraits des auteurs montdidériens dans les articles biographiques qui les concernent.

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