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Histoire de Montdidier
Volume III - Pièce justificative 120

par Victor de Beauvillé

Pièce justificative 120

Renseignements sur la famille Cauvel de Beauvillé.

Les Cauvel s'établirent à Montdidier dans le quinzième siècle. Colart Cauvel, ou Cawel, le premier dont on ait connaissance, était originaire de Suède ; il épousa, en 1483, Agnès de Halloy, fille de Baude de Halloy, ecuyer, seigneur de Bains et de Conchy ; Colart Cauvel est qualifié de sergent d'armes, titre recherché qui ne se donnait qu'à un petit nombre d'hommes d'élite, nobles d'extraction, chargés spécialement de veiller sur la personne du monarque et de défendre les châteaux-frontières. Pierre de la Tournelle, notre compatriote, l'un des héros de la bataille de Bouvines, était sergent d'armes. Par testament, en date du octobre 1477, passé pardevant Raquel, notaire à Noyon, Baude de Halloy légua à sa fille le fief de Carouge, situé sur les territoires d'Oreillers, Conchy et Mortemer.

Le 11 mars 1484, Colart Cauvel paya à Antoine de Crèvecœur, seigneur de Thoix, conseiller chambellan du roi, 8 liv. tournois pour droit de relief, et 20 sols pour droit de chambellage du fief noble de Carouge qui s'estent en soixante-six mines que terres que prés et en deux masures et demie, céans tant ès villes et terroirs de Ourvillers, Cunchies que au pays et terroir d'environ, tenu et mouvant de mondit seigneur de Crèvecœur, à cause de sa dicte terre et seigneurie de Tricot. Signé : Vasseur.

Le 18 mai 1485, Colart Cauvel fournit à Jacques Fouquelin, bailli et garde de justice de la ville, terre et seigneurie de Tricot, les dénombrement et déclaration de deux fiefs et nobles ténemens qu'il tient et advoue à tenir en foy et hommage de hault et puissant seigneur monseigneur Anthoine, seigneur de Crèvecœur, de Thiennes, de Thoix et de Tricot, ensemble des appartenances et appendantes à cause de sa dicte terre et seigneurie du dict Tricot, iceulx fiefs séant ès villes et terroirs de Cuveillies, Ourvillers, Sorel et ès marches d'environ. Suit le dénombrement .... Auxquels deux fiefs ci-dessus déclarés j'ai (Colart Cauvel) toute justice et seigneurie, haulte, moyenne et basse, la souveraineté réservée à mon dict seigneur, et à-cause d'iceulx fiefs, je suis tenu d'estovir mondit seigneur en ses plaids de Tricot quand je suis souffisamment adjourné..... Signé : Boulenguier.

Le 14 septembre 1488, Colart Cauvel vendit le fief de Carouge à Antoine Cauvel, son cousin germain, moyennant la somme de neuf vingt livres et seize sols, franc de toute charge. Colart Cauvel de Carouge, fut un des bienfaiteurs du prieuré de Notre-Dame de Montdidier, et contribua par ses libéralités à le tirer de l'état déplorable où l'avaient réduit les guerres des Bourguignons. Pierre Cauvel de Carouge, fils d'Antoine, fut maïeur en 1533-1534, et se signala par son intrépidité à venir au secours de ses concitoyens dans une peste horrible qui désolait la ville.

Dans de dix-septième siècle, la famille se divisa en trois branches : les Cauvel de Carouge, de Beauvillé et de Mocreux ; la première et la troisième branche sont éteintes, la seconde subsiste encore, et tire son nom d'un fief situé à Guerbigny dont elle était en possession dès le seizième siècle. Le 20 janvier 1605, Pierre Cauvel se rendit adjudicalaire en la prévôté de Montdidier d'immeubles appartenant à Anne Cauvel, sa parente, et comprenant 1° le fief de Boitteaux, dit Beauvillé, ses circonstances et dépendances et consistant en droict de justice haulte, moyenne et basse et huit livres de censives ou environ à prendre sur plusieurs maisons, moulins, airs, prez, bois et vuignes sizes au village de Guerbigny. 2° Item, une maison, lieu et pourpris consistant en quatre journaux séant au dit Guerbigny au long du chemin de Mondidier, d'autre au long du bois du Marest. Et en outre dans trente-sept journaux vingt-cinq verges de terre, et cent vingt journaux formant une partie de la montagne de Buincourt, appelée depuis montagne de Quiquennoi et aujourd'hui du Petit-Quesnoy. Le 26 juin 1610, Pierre Cauvel de Beauvillé fournit le dénombrement de sa terre à François d'Hervilly, écuyer, seigneur de Denise, de qui relevait le fief de Beauvillé ; depuis plus de deux siècles et demi cette propriété est restée dans la famille.

Pendant trois cents ans, les Cauvel fournirent presque sans interruption des magistrats aux différents corps judiciaires de Montdidier. Durant la Ligue, Jean Cauvel de Carouge, conseiller en l'élection, se retira à Compiègne, ne voulant pas violer le serment de fidélité qu'il avait prêté à Henri III, et il ne revint à Montdidier que lorsque la ville se fut soumise à l'autorité royale ; Jacques Fuscien Cauvel de Beauvillé, maïeur en 1690, fut un des avocats du roi au bailliage les plus célèbres. L'énergie de son style ne le cédait point à l'éclat de sa parole. Felix Cauvel de Beauvillé, mon bisaïeul, doit être rangé au nombre des maïeurs les plus distingués du dix-huitième siècle ; il établit des règlements de police dont quelques-uns sont encore en vigueur. La charge de procureur du roi en l'élection était héréditaire dans la famille : c'étaient des fonctions plus onéreuses que lucratives, car elles rapportaient à peine 300 liv. et exigeaient une certaine représentation ; mais anciennement on était magistrat surtout pour l'honneur.

Conseiller au tribunal d'appel d'Amiens en 1810, puis, sur sa demande, procureur impérial près le tribunal de première instance de Montdidier, ensuite président au même siége et plus tard président à la cour royale d'Amiens, mon père soutint dignement dans ces différentes fonctions la réputation de savoir et d'intégrité qu'avaient acquise ses ancêtres ; la droiture de son caractère, son désintéressement sincère, l'étendue de ses connaissances, l'affabilité de ses manières et son empressement à obliger ses compatriotes lui méritèrent la considération générale ; mon frère marchait sur ses traces, lorsque la révolution de 1848 vint briser sa carrière. Il accepta sans se plaindre une injuste disgrâce et refusa de faire d'une destitution honorable un marchepied pour obtenir un avancement plus rapide ; resté membre du conseil général, sa conduite indépendante lui a concilié l'estime de ses collègues, le suffrage des hommes de cœur, et, sans l'emploi de manœuvres qui excitèrent l'indignation et le dégoût des honnêtes gens, il serait arrivé à une position qui lui eût permis d'être plus utile au pays.

Nommé par le préfet de la Somme membre d'une commission chargée d'examiner les produits de l'Exposition universelle, il est auteur d'un Rapport sur les constructions et ameublements, inséré dans l'ouvrage intitulé : Application de l'exposition aux intérêts départementaux. Amiens, Duval, 1656, in-8°. Autre édition, Abbeville. Jeunet. 1857, in-12. Il a été-fait un tirage séparé : Abbeville. Jeunet. 1856, in-8° 20 pages. Son concours m'a été extrêmement utile pour la révision de cette Histoire, et je lui en ai les plus grandes obligations.

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