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IGN
Certains pensent que le Santerre représente un petit secteur du département de la Somme centré aux environs de Lihons en Santerre. C'est faux.
La vérité est que le Santerre couvre une superficie importante (plus de 3 000 km²) dans l'est du département de la Somme et dans le nord-est du département de l'Oise.
Voici ci-joint une carte montrant l'étendue du Santerre dans le nord de la France. Le tracé rigoureux des limites du Santerre a été rendu possible en prenant en compte de nombreuses cartes extrêmement précises du Nord de la France datant pour la plupart du XVIIe et du XVIIIe siècle.
Pour plus d'informations, on se reportera à cette page : localisation et limites du Santerre.
Le mot Santerre est très ancien. On le retrouve de manière indiscutable sous sa forme latine Sana Terra à deux reprises dans un texte ancien du 8 septembre de l'an 883 : ../.. in pago Ambianensi, in Sana Terra, in loco qui vocatur Rosierias. La signification de Sana terra semble évidente : terre saine et fertile.
Dans certains écrits, on trouve l'appellation sangterre. Cela pourrait signifier terre de sang, c'est-à-dire terre rouge.
A noter que des hypothèses tentent de donner une autre explication, sans convaincre toutefois :
Dans la Chronique de Saint-Denis, les auteurs affirment que vers l'an 450, Dagobert fit à Lihons en Santerre un si grand carnage des Huns et autres barbares, que la terre fut inondée, et pour ainsi dire abreuvée de leur sang, d'où il aurait été nommé Lihons en sang terre (les Huns en terre de sang), c'est à dire les Huns ou locus Hunnorum in sanguine terso.
Selon cette page de toponymie de lieux picards, l'origine du mot Santerre serait : sand (sable) + terre. Je préfère m'abstenir de tout commentaire.
Pour plus d'informations, on se reportera à cette page : étymologie du mot Santerre.
L'essentiel du Santerre est situé sur un plateau crayeux. La partie supérieure de cette craie a été déposée au sénonien dans une mer tropicale. Localement, le plateau crayeux est recouvert de sables, de marnes, de calcaires ou d'argiles déposées au cénozoïque ou encore de limons déposés au quaternaire. Le Santerre est d'ailleurs réputé pour ses limons fertiles dont l'épaisseur atteint localement plus de 5 mètres.
Géologiquement, le Santerre se situe dans le bassin parisien.
La ligne de partage des eaux entre le bassin de l'Oise et le bassin de la Somme traverse le Santerre.
La synclinal de la Somme est présent dans la partie nord du Santerre. Un axe anticlinal est présent dans la partie sud du Santerre. Il est appelé anticlinal de Margny-lès-Compiègne ou anticlinal de Méry-la-Bataille, ou encore anticlinal de la Bresle. Cet anticlinal est utilisé dans le secteur de Cuvilly/Gournay-sur-Aronde en tant que réservoir souterrain de gaz.
De nombreux sites archéologiques attestent de l'occupation humaine du Santerre dès les temps protohistoriques.
Les sites Setuci et Rodium sont
mentionnés sur la table de Peutinger.
Ils sont sur l'ancienne voie romaine
entre Amiens et Reims.
Au premier siècle avant notre ère, Jules César et son armée se sont rendus maîtres du Santerre, région qui était alors occupée par les Bellovaques au sud-ouest et par les Viromanduens au nord-est.
Les périodes prospères où les Gallo-Romains bâtissaient d'immenses villas, chaussées romaines, amphithéâtres, etc. alternent avec des périodes d'invasions barbares. Francs, Alamans, Huns figurent parmi les peuples envahisseurs. Au Ve siècle, le Santerre est littéralement dévasté.
Le Santerre connaît quelques périodes de forte prospérité comme au XIIe siècle lors de l'optimum médiéval. Mais de nombreux épisodes désastreux alternent avec ces ères de tranquillité. On peut citer :
Les invasions des Vikings au IXe siècle
Les guerres de Philippe Auguste à la fin du XIIe siècle
La Jacquerie (1358)
La Guerre de cent ans (1337-1453) : à cette époque, le Santerre est régulièrement dévasté par les Anglais, les Bourguignons et même les Français (!)
Le prolongement de la Guerre de cent ans : Charles le Téméraire et Louis XI continuent de ruiner le Santerre jusqu'au traité de Picquigny (1475)
Le 19 septembre 1418, le gouvernement de Péronne, Montdidier et Roye devient distinct de celui de la Picardie.
Cette période est plus calme que la précédente ; à noter toutefois :
Invasion des Anglais et des Allemands (1523)
Invasion des Espagnols (1636)
La Révolution française
Le 4 février 1568, Charles IX confirma la séparation des trois villes de Péronne, Montdidier et Roye du gouvernement de Picardie. Henri IV confirma aussi en 1594 cette séparation. Le gouvernement des trois villes fut indépendant de celui de Picardie jusqu'en 1636.
Invasion de mars 1814 : Cosaques et Prussiens terrorisent le Santerre à l'issue de la première grande déroute napoléonienne
Invasion de juin 1815 : Anglais, Hollandais, Belges et Prussiens occupent et rançonnent le Santerre à l'issue de la deuxième grande déroute napoléonienne
Invasion allemande de 1870 : le Santerre est occupé et rançonné
Lors de la Première Guerre Mondiale, les Allemands ont ravagé le Santerre d'une manière telle qu'elle nous paraît inconcevable aujourd'hui. De 1914 à 1918, la région est anéantie et des centaines de milliers d'hommes meurent sur ce territoire. Le désastre est pire qu'à Verdun. A l'issue de cette horrible guerre, la région est partiellement reconstruite durant de longues années. Le Santerre intègre dans son paysage de nombreux cimetières militaires et compte plusieurs communes décorées de la Croix de Guerre. Le Santerre conserve aussi pour plusieurs siècles le souvenir tragique de la Grande Guerre : tous les ans, des obus datant de la première Guerre Mondiale refont surface.
La Seconde Guerre Mondiale n'a pas épargné le Santerre. De nombreuses destructions et d'événements lamentables sont à déplorer durant cette période.
Quelques compléments sont fournis dans cette page : histoire du Santerre.
En ce troisième millénaire, les Santerrois, fidèles à leurs prédécesseurs, savent se faire entendre quand ils n'acceptent pas des projets qu'on veut leur imposer. Revenons sur les deux plus évidents.
L'aéroport
En 2001, à l'issue d'un débat tronqué, un projet de création d'aéroport atterrit dans le Santerre. Les Santerrois sont très majoritairement hostiles (plus de 90% sont opposés d'après un référendum) à ce projet d'aéroport qui menace d'expropriation des centaines de personnes, plusieurs communes et des cimetières militaires, ce qui est du jamais vu.
Au terme d'une âpre lutte, la raison finit par l'emporter : le projet est définitivement abandonné en décembre 2003 par l'État. En lieu et place, un réseau aéroportuaire utilisant les aéroports existants est lancé.
Décharge
Les projets de décharge (on utilise aussi parfois l'expression intéressante de centre d'enfouissement technique) ne sont pas souvent accueillis avec enthousiasme. Mais quand on cherche à imposer avec précipitation une décharge sur un site historique et dans un secteur boisé devenu fort rare, la population sait se faire entendre. À juste titre.
Peut-être qu'une meilleure acceptation de ce genre de dossier passe par un respect des Santerrois en leur proposant des solutions modernes et novatrices, en choisissant mieux les sites et en les consultant plutôt qu'en leur imposant des décisions.
Les remembrements
Les remembrements ont normalement vocation à améliorer les exploitations agricoles via une concentration des parcelles agricoles. Par la même occasion, les remembrements doivent jouer un rôle positif dans l'aménagement rural.
Cependant, des critiques s'élèvent contre les remembrements. Parmi les reproches courants, citons :
Dans quelques cas, on constate que les remembrements sont effectivement nuisibles à l'environnement, au cadre de vie des riverains et aux finances publiques.
Éoliennes
Dans le Santerre, on compte aussi un certain nombre de projets
d'éoliennes qui sont pour beaucoup repoussés par les habitants au motif que les
éoliennes dégradent le paysage, apportent de nouvelles nuisances, produisent peu
d'énergie à un tarif n€tt€m€nt plus élevé qu'avec les moyens classiques, et ne
génèrent pas d'emploi durable. Par ailleurs,
le potentiel éolien du Santerre est indiscutablement bien plus faible que dans
d'autres régions.
Voir aussi mon regard sur les
éoliennes du Santerre.
On entend souvent dire que le Santerre est « plat » en sous-entendant qu'il s'agit d'un défaut. Or, non seulement cette affirmation est erronée, mais même si c'était le cas, ce ne serait pas une tare.
Pour preuve, il suffit de consulter les cartes de Cassini ou les cartes de l'IGN afin de vérifier que le Santerre présente des ondulations marquées, possède des vallées importantes et dispose d'un relief prêt à exténuer les randonneurs et cyclistes présomptueux qui n'ont pas adapté leur effort au terrain surprenant.
Bien d'autres régions présentent un relief considérablement plus faible que celui du Santerre, mais ne sont pas critiquées pour cela. Ainsi, le Vimeu et le Ponthieu abritent la baie de de Somme qui est universellement reconnue comme l'une des plus belles baies du monde ; son relief est cependant loin d'être montagneux.
Le Santerre ne manque pas d'atouts qui lui promettent un bel avenir :
Est-ce que les élus et les collectivités sauront valoriser et dynamiser le Santerre comme il le mérite (sécurité, équipements publics, emploi, tourisme, accès Internet à très haut débit, infrastructures de transport, protection de l'environnement, formation, etc.) ?
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