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Histoire de Montdidier
Livre III - Chapitre V - § I

par Victor de Beauvillé

§ I

PRÉVOTÉ.

Ancienneté de la prévôté. — Sentences prévôtales. — Fonctions du prévôt. — Arrêts divers. — Condamnation d'Oudart Piret. — Étendue de la prévôté. — Ses attributions. — Contestations avec le bailliage. — Organisation de la prévôté. — Sa suppression. — Armoiries. — Liste des prévôts.

La prévôté était la juridiction la plus ancienne de Montdidier ; elle existait avant la réunion de cette ville à la couronne. Le prévôt était un personnage considérable et le premier officier de justice du comte ; aussi son nom figure-t-il dans les actes du douzième siècle qui, en bien petit nombre, sont arrivés jusqu'à nous. Nous avons dit, en parlant du comté de Montdidier, qu'en 1176 Philippe d'Alsace, comte de Flandre et de Vermandois tint sa cour à Montdidier, et y prononça sur un différend qui s'était élevé au sujet de la terre de Giraumont, entre quelques-uns de ses vassaux et les religieux de Saint-Jean-au-Bois, près Compiègne ; le nom du prévôt Raoul est inscrit dans la sentence avant ceux de Bérenger, prieur de Monbtdidier ; de Dreux, chapelain du Saint Sépulcre, et des autres personnes qui ont assisté au jugement (Pièce just. 6.) L'église Saint-Pierre de Beauvais étant en discussion avec le maïeur de Puceuses, village près Ravenel, relativement à quelques droits féodaux que le maïeur prétendait lui appartenir, Raoul, prévôt de Montdidier, fut pris pour arbitre et parvint à concilier les parties. Philippe d'Alsace confirma (1183) l'accord fait par son prévôt et s'engagea à en maintenir l'exécution ; le nom de Raoul paraît en tête des signataires de l'acte. (Pièce just. 7.)

Le père Daire est tombé dans une étrange erreur au sujet de ce prévôt ; il pense que Raoul, qui se rencontre en 1183, est sans doute le même que celui à qui Orderic Vital donne la qualité de consul de Mondidier, en lui faisant conduire, conjointement avec Guy, comte de Ponthieu, et par ordre du roi Henri Ier, un corps de troupes dans la Neustrie. En effet, la qualité de consul, qui vient des Romains, avoit assez d'affinité avec celle des prévôts. (Histoire de Mondidier, p. 54.) Si le père Daire avait consulté les dates, il aurait vu que la bataille de Mortemer, dont parle Orderic Vital, s'était livrée en 1054 ; or il est impossible qu'un individu qui y aurait pris part fût encore de ce monde cent trente ans après ; le Raoul, qui accompagnait Guy de Ponthieu, était Raoul de Crépy, comte de Montdidier, mort en 1074.

Le Cartulaire de Philippe-Auguste (Biblioth. nationale, n° 9,852) fait mention d'un jugement criminel rendu dans la châtellenie de Montdidier, à l'époque où les comtes exerçaient encore l'autorité souveraine. L'exposé est fort court : Tempore comitis Philippi, occidit Robertus de Tanes quemdam hominem in castellania Montisdesiderii, comes fecit domos ejus dirui et cepit ejus catalla. C'est la plus ancienne condamnation dont on ait conservé le souvenir ; la confiscation des meubles et la destruction de la maison du criminel étaient un châtiment très-usité au moyen âge.

Dans la charte communale de 1195, qui consacra l'existence de la juridiction prévôtale, Philippe-Auguste se réserve expressément la prévôté de Montdidier et sept sergents à ses ordres. Le jugement des affaires de meurtre, de rapt et d'incendie était exclusivement dévolu au prévôt. L'interprétation de cette clause donna lieu à de grands débats entre la prévôté et l'échevinage. Nous avons vu, au chapitre de la Mairie, comment la justice municipale parvint à s'attribuer la connaissance de ces sortes de causes.

Les fonctions du prévôt étaient de deux natures, financières et judiciaires : il était chargé de la recette de certains droits appartenant au roi, de rendre la justice en son nom, et de veiller à l'exécution des jugements. En 1202, Montdidier ne faisait qu'une prévôté avec Roye, Compiègne, Choisy et Thourotte. Les revenus s'élevaient à 2,630 liv. ou 54,704 francs. Les 600 liv. que la ville payait au roi pour l'établissement de la commune n'étaient pas comprises dans cette somme. Dans le compte du mois de novembre de cette année 1202, les gages des sergents du prévôt sont portés à 7 liv. ou 145 fr. 60 centimes.

Le montant des recettes que le prévôt touchait pour le roi lui était payé trois fois l'an, en trois termes égaux : à la Toussaint, à la Chandeleur et à l'Ascension. Le revenu des métairies, fours, moulins, pressoirs, prés, rivières, étangs, marchés, halles, étaux, droits de sceaux, de greffe et de tabellionage faisaient partie des recouvrements qui lui étaient confiés ; mais à Montdidier ces droits étaient réduits à peu de chose, par suite de la cession que Philippe-Auguste en avait faite aux habitants.

La réunion en une seule prévôté de Montdidier, Compiègne, Roye, Choisy et Thourotte ne subsista pas longtemps ; en 1219, Montdidier formait une prévôté séparée ; cependant c'était encore la même personne qui était chargée de la perception de Montdidier, Roye et Compiègne. En 1227, toute communauté cessa d'exister entre ces villes, et chacune d'elles eut un compte particulier de recettes et de dépenses.

L'autorité judiciaire donnait aux prévôts une grande importance. Le Cartulaire de Philippe-Auguste renferme plusieurs sentences prononcées par le prévôt de Montdidier ; comme elles sont très-courtes, nous les mettons sous les yeux du lecteur. Le chapitre du Cartulaire qui les contient est intitulé :

Inquisitio de justicia Roie et Montisdesiderii.

« Joannes Bocherel, de castellaniaMontisdesiderii, fecit judicium aquæ frigidæ propter meurtrum sibi impositum, ipse incidit, rex fecit justitiam de eo ; Guillemus de Mellote, miles, requisivit feodum suum et habuit illud.

Fulco de Tanes, et Rogerius filius Radulphi prepositi, burgenses domini regis, occiderunt quemdam burgensem regis, et propter hoc dominus rex habuit pro emenda sua exinde CCC libras, et hoc factum fuit in castellania Montisdesiderii. »

Tous les crimes se rachetaient autrefois à prix d'argent ; le meurtre est tarifé ici à 300 liv. ou 6,240 francs. La qualification de bourgeois royaux donnée à Foulques et à Roger est synonyme de celle de bourgeois de Montdidier :

Radulphus de Pratellis, miles, homo regis ligius, occidit quemdam hominem burgensem de Ambianis in castellania Montisdesiderii ; rex cepit res ejus, et inde habuit emendam suam.

Rabertus de Cuiovreel, occidit quemdam hominem regis apud Cuiovreel in castellania Montisdesiderii ; Guillelmus Pastes, miles, propter hoc fecit domus suas comburi et cepit ejus catalla. »

Sur trois cas d'homicide, il intervient trois condamnations différentes.

Les prévôts excédaient souvent les bornes de leur juridiction, et les choses étaient poussées quelquefois tellement loin que le recours au parlement était illusoire, le condamné ayant subi sa peine. Un prévôt de Montdidier, nommé Oudart Piret, plus entreprenant que les autres, fit arrêter, nous ne savons pour quel motif, un clerc nommé Caussin, et le condamna à être pendu. Le jugement fut exécuté. L'évêque d'Amiens, Jean de Cherchemont, dénonça cette condamnation au parlement, demandant vengeance du prévôt et réparation publique de l'attentat commis contre la personne d'un ecclésiastique.

Le parlement fit droit à la plainte de l'évêque, et, le 13 août 1344, il rendit un arrêt qui dut ôter au prévôt l'envie d'empiéter sur les priviléges du clergé. Oudart Piret fut déclaré incapable de remplir aucun emploi public, et condamné à aller enlever le corps de Caussin du gibet où on l'avait attaché ; mais, comme le cadavre était probablement tombé en putréfaction, le parlement spécifia minutieusement toutes les formalités que le prévôt accomplirait pour tenir lieu de cet acte expiatoire. Oudart Piret devait faire exécuter un mannequin représentant Caussin et le suivre au gibet, revêtu d'une tunique, sans capuchon et sans ceinture. Quand le cortége serait arrivé au gibet, l'effigie de Caussin devait y être accrochée : Oudart Piret était tenu de la détacher de ses propres mains, de la remettre à l'évêque ou à ses mandataires, et de la faire transporter sur une civière, entourée de torches allumées, au cimetière de Saint-Pierre pour y être enterrée. Oudart suivrait, répétant par les rues, les carrefours et autres lieux publics : Ce Caussin était clerc, je l'ai jugé injustement et je l'ai fait pendre. Le coupable aurait à la main un cierge du poids de deux livres, qu'il offrirait à l'église pour le repos de l'âme du défunt ; puis, la civière déposée dans l'église, il resterait en prison à Montdidier, jusqu'à ce qu'il eût payé 20 liv. tournois. En outre, Piret fut condamné à donner à l'évêque 2 florins, l'un à l'écu, l'autre au pavillon, pour les torches et le luminaire, et à lui remettre 40 sols qu'il avait pris sur les biens de Caussin ; de plus, il lui fallut compter à la famille du malheureux clerc 200 liv. à titre de dommages et intérêts, enfin verser dans le trésor royal une amende de 1,000 livres tournois.

Cette sentence rigoureuse se rapproche beaucoup de celle qui fut rendue en 1244 par Arnoul, évêque d'Amiens, contre Geoffroy de Milly, bailli de cette ville, qui avait fait pendre, sans forme de procès, cinq clercs qu'il accusait d'avoir déshonoré sa fille. L'arrêt relatif à Piret est en latin, et se trouve dans l'Histoire de Mondidier, page 348.

Quelques prévôts abusèrent de leur autorité, et, moyennant finance, firent arrêter et jeter des innocents dans la fosse aux larrons, au beffroi ; d'autres, au contraire, relâchaient pour de l'argent des coupables qui échappaient à une punition méritée. Les Archives nationales conservent des lettres de grâce, faisant mention de divers chefs d'accusation concernant Gadiffert de Jainchy, prévôt de Montdidier, inculpé d'avoir commis de nombreux méfaits dans l'exercice de sa charge. (Pièce just. 114.)

Le prévôt avait, comme l'on sait, des sergents spéciaux, sa prison et ses fourches patibulaires. La justice royale était près du moulin à vent dit le moulin du Fer-à-Cheval, situé à peu de distance de la ville, à gauche de la route du Monchel.

La prévôté comprenait dans sa juridiction plus de deux cent trente bourgs et villages. Du côté d'Amiens, elle s'étendait jusqu'à Boves, et, du côté de Beauvais, les premières maisons de cette ville, en arrivant par la route de Breteuil, en faisaient partie. Il y avait encore, au commencement du dix-septième siècle, sur le pont Saint-Laurent, un siége de grès sur lequel le prévôt s'asseyait lorsqu'il venait rendre la justice ; aussi l'appelait-on le siége du prévôt de Montdidier. Depuis la création du présidial de Beauvais (1582), le prévôt de Montdidier cessa d'avoir autorité dans cette ville.

Anciennement la prévôté s'affermait. Raoul de Loques, écuyer, qui était revêtu de cette charge en 1340, n'ayant pu payer au roi 300 liv. qu'il lui devait, Pierre Dupin, receveur du bailliage de Vermandois, fit saisir les biens du prévôt, situés à Paillart, à Breteuil et à Abbémont, et les fit vendre à la criée dans la Salle du Roi. Le procès-verbal de saisie et de vente est un document judiciaire intéressant à consulter pour connaître la procédure de l'époque. (Pièce just. 115.)

La prévôté rencontra un adversaire constant dans la mairie. Il était difficile que les chefs de ces deux corps pussent vivre en bonne intelligence. Chargés l'un et l'autre de rendre la justice, il y avait entre eux des conflits continuels ; c'était à qui empiéterait sur les attributions de son rival ; aussi les contestations étaient-elles sans cesse renaissantes : les Olim nous ont conservé des monuments de cette rivalité qui remontent à plusieurs siècles. (Pièce just. 116.) La vanité vint encore augmenter ces éléments de discorde. Dans l'origine, les officiers de la prévôté n'avaient que le simple titre de prévôt ou de juge ordinaire et garde de la prévôté de Montdidier. Dans le traité d'Arras (1432), il n'est parlé que des villes, chastellenies et prévostés foraines de Péronne, Montdidier et Roye, et dans le procès-verbal de la rédaction de la Coutume, en 1567, Romain Pasquier n'a point d'autre qualité que celle de prévôt forain de Montdidier. Au mois de décembre 1591, Jean Pasquier, son fils, obtint des lettres de noblesse. Le 5 novembre 1595, les maïeur et échevins, s'opposèrent à l'entérinement de ces lettres, s'appuyant sur ce que « Jean Pasquier a pris la qualité de prévost de la ville de Montdidier, ce qui est contraire aux droits de justice qui leur appartiennent privativement à tous autres juges en première instance, et dont ils sont en possession paisible même par la rédaction de la Coutume faite en la présence de M. Romain Pasquier, son père, lui vivant prévost de la prévosté de Montdidier, qui ne s'est point qualifié prévost de la ville de Montdidier, mais seulement prévost forain de Montdidier ; et disent, que depuis 38 ans, maistre Romain Pasquier, natif de Bulles, advocat, est venu s'établir à Montdidier où il a pris alliance en la maison de Me Pierre de la Morlière, lui vivant receveur des tailles de Montdidier, et trouvé en icelle commodités ;

Du depuis et assez tôt après, a acheté de M. Pierre Vaillant cet office de prévost forain audit Montdidier, lequel office il a exercé jusqu'à son décès, s'emploiant quelque fois aux offices du seigneur de Piennes ; ledit office de prévost resigné audit M. Jean Pasquier par son père luy a esté estimé 4,000livre . »

Malgré l'opposition des maïeur et échevins, les lettres de noblesse de Jean Pasquier furent enregistrées à la cour des comptes le 6 avril 1596, à la charge de payer annuellement la ville, pour l'indemnité due au public, 20 écus, rachetables au capital de 400 écus.

Le titre modeste de prévôt forain ne flattait pas l'amour-propre de ceux qui en étaient revêtus ; aussi firent-ils tous leurs efforts pour avoir celui de Prévost royal, s'appuyant sur la charte de Philippe-Auguste, qui, selon eux, justifiait parfaitement leur prétention. S'il en eût été ainsi, les prévôts n'auraient pas attendu aussi longtemps, et se seraient mis dès l'origine en possession de ce titre, objet de leur ambition ; mais la ville, gardienne vigilante de ses prérogatives, s'y opposa énergiquement, craignant qu'avec le nom le pouvoir ne suivît de près : il y eut, à ce sujet, une polémique aussi longue qu'animée. Enfin, dans le dix-septième siècle, l'usage s'établit, bien que le principe ne fût pas reconnu, de qualifier la prévôté de Montdidier de prévôté royale.

Le prévôt, concurremment avec le maire et les échevins, connaissait des causes des habitants ; il jouissait de deux priviléges remarquables, consistant : le premier, à avoir la prévention et la connaissance de toutes les causes des sujets des seigneurs hauts justiciers domiciliés dans le ressort de la juridiction, en tontes matières personnelles, réelles, civiles, criminelles, sans être tenu d'en faire le renvoi, quand même elles seraient revendiquées. Ce droit, fondé sur la Coutume et sur la possession immémoriale, avait été sanctionné par de nombreux arrêts rendus contradictoirement avec les seigneurs hauts justiciers, et notamment avec les maire et échevins de Montdidier. En vertu du second privilége, la prévention, qui partout était de droit commun entre les baillis, les sénéchaux et les prévôts royaux, à l'égard des sujets des seigneurs hauts justiciers, n'avait pas lieu dans l'étendue de la prévôté de Montdidier ; de sorte qu'en première instance, il était interdit aux sujets de ces seigneurs d'user de prorogation de juridiction au bailliage.

Ces deux priviléges, que ne possédait aucune prévôté du royaume, avaient été confirmés par lettres patentes de Henri II du 8 septembre 1555, publiées et enregistrées au parlement au mois de novembre de la même année. Par ces lettres, le roi déroge, en faveur du prévôt de Montdidier, aux dispositions de la déclaration donnée à Laon le 17 juin 1554, laquelle interprétait et modifiait l'édit de Crémieux, du mois de juin 1536.

Les appels des jugements du prévôt étaient portés, suivant le cas, soit au présidial de Beauvais, soit au présidial de Laon. Pour avoir de plus longs détails sur la prévôté, il faut consulter le Commentaire de de la Villette sur la Coutume de Montdidier ; toutefois nous ferons remarquer que, comme cet auteur était prévôt, on doit se tenir en garde contre ses paroles ; il est partie intéressée, et très-disposé à étendre les priviléges de sa charge ; aussi l'interprétation qu'il donne de certains articles de la Coutume, et les titres sur lesquels il s'appuie pour relever la dignité de ses fonctions, trouvèrent-ils de son temps de nombreux contradicteurs.

La prévôté avait également des discussions fréquentes avec le bailliage. La diversité de juridiction jetait la confusion parmi les justiciables, et soulevait entre les magistrats des rivalités fâcheuses. Pour connaître exactement les attributions de la prévôté et du bailliage, il faut lire l'arrêt du parlement, du 15 juin 1659, portant règlement général entre les officiers du bailliage et de la prévôté. Cet arrêt a été imprimé à Paris, chez Lesselin, et forme une brochure de vingt et une pages in-quarto ; il fut rendu à la suite de contestations très-vives, et même de voies de fait survenues entre Pierre de Bertin, président au bailliage, et le prévôt, Jean de la Villette. Les démêlés dont il s'agit donnèrent lieu à des factums d'une violence extrême, dans lesquels des épithètes injurieuses s'échangent de part et d'autre ; on se traite d'impertinent, d'impudent, d'insolent et de badin. Les accusations les plus graves ne sont point épargnées : celles de faux , de concussion et de malversation reviennent à chaque page. On a peine à comprendre comment, en présence de pareilles allégations, les justiciables pouvaient garder quelque respect pour des magistrats qui se diffamaient ainsi réciproquement. La lecture de ces factums est une curieuse étude des mœurs judiciaires au dix-septième siècle.

Au commencement du siècle dernier, on réunit à la prévôté de Montdidier celle de la Neuville-le-Roy, dont la suppression fut définitivement prononcée. Mais, au fond, cette extension de pouvoir était purement illusoire, car la prévôté de la Neuville-le-Roy n'existait que de nom : il n'y avait pas de prévôt dans ce bourg, et celui de Montdidier y faisait seul l'exercice de sa charge. La prévôté était vénale, comme toutes les places de magistrature : des lettres patentes du roi conféraient à celui qui en devenait propriétaire le droit d'entrer en fonction.

La prévôté formait un corps considérable ; elle se composait du prévôt, d'un lieutenant civil, d'un lieutenant criminel, d'un assesseur, de deux conseillers, d'un avocat, d'un procureur du roi et d'un substitut, d'un commissaire aux saisies réelles receveur des consignations, d'un greffier, d'un huissier audiencier et de quelques sergents. Plus tard, cette juridiction ayant été très-restreinte, le prévôt cumulait plusieurs charges ; quand on la supprima, il n'y avait qu'un prévôt et deux conseillers.

Depuis longtemps l'autorité du prévôt avait singulièrement diminué. Une déclaration du roi de 1555 constatait que, dès cette époque, la prévôté tiraillée, morcelée, n'avait plus que très-peu de justiciables ; leur nombre alla toujours en décroissant. Enfin, au mois d'avril 1749, on abolit les prévôtés dans tout le royaume, dans le but de simplifier les procédures et d'abréger leur longueur. Les justiciables de cette antique institution, qui comptait plusieurs siècles d'existence, furent réunis à ceux du bailliage, à l'exception d'une vingtaine de paroisses et hameaux qui cessèrent en même temps de faire partie du bailliage et furent la plupart annexés au présidial de Beauvais.

La prévôté tenait ses audiences dans la salle du bailliage. Les officiers de ce corps judiciaire portaient pour armoiries en 1697 : d'argent, à une bouterolle d'azur.

LISTE DES PRÉVOTS.

1130. Obert.

1176. Raoul.

1178. id.

1183. id.

1190. Roger.

1238. Henri Triberie.

1242. Matthieu de Coucy.

1256. Garin Pigoux.

1257. id.

1258. id.

1261. id.

1310. Thomas le Bonne.

1334. Oudart Piret.

1340. Raoul de Loches ou Deloque, écuyer.

1343. Oudart Piret.

1351. Gilles de Roie.

1352. id.

1357. Henri du Cange.

1363. Oudart Prier.

1379. Gadiffert de Jainchy.

1380. id.

1383. Guillaume Cassart, dit Floridas, écuyer.

1385. Guillaume du Hamel, dit Froissart, écuyer.

1388. Pierre de Hangest.

1399. Robert de Jumelles, écuyer.

1413. Collart Grégoire.

1416. Simon Delienin.

1426. Renard de Guines, écuyer, prévôt pour le roy et monseigneur le duc de Bourgogne.

   Id.    Pierre Boileau, prévôt du roy et de la tournelle de Montdidier.

1428. Jean de Cambron.

1434. Pierre de Béthencourt, écuyer.

1434. Jacques Clugnet.

1436. Jean de Canthegnies, écuyer, dit Tristan ; il était en même temps capitaine de Montdidier.

   Id.    Pierre Dogue Petit.

1441. Aubert Lescuier, écuyer.

1447. Jean de Blangy, écuyer, seigneur d'Auchy.

1451. Pierre Lignières.

1453. Jean Desmares.

1456. Jean Desmaret, écuyer, prévôt de Montdidier pour le roy nostre sire et mon très-redoubté seigneur le duc de Bourgogne.

1463. Antoine de Brolly, écuyer.

1469. Louis de Brethel.

1470. Jean Mathieu, prévôt forain.

1477. Charles Formé.

1481. Charles Formé, sieur d'Auzain , écuyer tranchant du roi.

1484. Laurent de Béthencourt, écuyer.

1491. Firmin le Parmentier.

1500-1507. Jean Baterel.

1507-1537. Jean Lagoul.

1537-1552. Pierre Vaillant.

1553-1580. Romain Pasquier.

1580-1608. Jean Pasquier, écuyer, sieur de Blin.

1608-1620. François de Leuvain.

1620-1631. Jean Dufour.

1632-1663. Jean de la Villette, auteur du Commentaire sur la Coutume de Montdidier.

1663-1666. Pierre de la Villette.

1667-1672. Jacques Boullé.

1672-1695. Antoine de Saint-Fussien.

1695-1716. André-Édouard de Saint-Fussien.

1716-1749. Jacques Fourment ; sa charge lui fut remboursée 8,500 livres.

Jusqu'au seizième siècle, il y eut des lieutenants du prévôt ; nous n'avons pas cru devoir rapporter ici leurs noms et grossir inutilement cette liste. La nomenclature des lieutenants eût été beaucoup plus incomplète encore que celle des prévôts ; douze ou quinze noms seulement sont parvenus à braver l'injure du temps, et il importe peu au lecteur de les connaître.

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